Carcassonne

Son château, son cassoulet, sa voltige...

 
 

Carcassonne cité médiévale, haut lieu historique Cathare.
Fin janvier, le vent souffle fort. Le plafond est bas. Apres quatre heures d'autoroute, dont trois sous une pluie battante, l'arrivée à quelquechose de magique. De l'autoroute, on apercoit les remparts, imposants. Vision magnétique d'un autre temps, dont il est difficile de détourner le regard.
Arrivée dans ce lieu pour faire un stage de voltige semble un peu irréel, décalé, surréaliste.... Le temps et la technologie se téléscopent dans un rayon de trois kilomètres. Il va falloir résister à l'appel des vieilles pierres.....

Car le Centre de Carcassonne du SEFA, ca n'est pas rien. Quinze TB10 et TB20, deux CAP10, un service de piste pour le ravitaillement, des mécanos en permanence sur le pont, trois simulateurs, un labo de langues, du matériel audio-visuel et informatique dernier cri. De quoi faire pâlir les trois-quarts des clubs de France et de Navarre... Les locaux donnent directement sur le tarmac, et l'on voit matin et soir un magnifique 737 de Ryan Air, transformé en immense panneau publicitaire couleur argent (... forcément !) pour les voitures Jaguar, se poser et repartir pour Londres. On peut aussi y voir passer des Tucano, des Nord 262, des Tigre (l'hélico de combat dernier cri).

Le Centre forme des PPL, des CPL, .... et des voltigeurs. Le mot "formation" de voltigeurs n'est pas tout a fait adapté. En fait, le Centre "entraine" des voltigeurs. Ils viennent maintenant de toute l'Europe, mais essentiellement de France évidemment, pour faire des stages d'une semaine. Si vous êtes intéressé, il faut réserver un an à l'avance. Si vous ne faites pas de compet, ce n'est même pas la peine de décrocher votre téléphone. C'est le haut lieu de l'entrainement de l'Equipe de France de Voltige. En tout cas son centre névralgique, car les stages ont lieu un peu partout sur les terrains qui acceptent 4 ou 5 voltigeurs, qui vont s'entrainer matin et soir pendant une semaine. C'est pas partout qu'on peut faire ca.....
Mais le quartier général est ici. C'est là qu'entre deux vols, ou entre deux stages, vous pourrez joindre Claude Bessiere, alias Coco. Le plus souvent il faudra vous contenter de lui laisser un message sur son répondeur. D'ailleurs, il n'arrête pas de l'écouter entre midi et deux, le soir après les vols, en arrivant le matin.....

Une semaine de stage instructeur voltige, supervisée par Coco Bessiere. De quoi faire saliver tout amateur d'enchainements et de  figures bien faites.
Difficile de parler de Coco. Tout a été dit sur lui, et pourtant, on pourrait passer des heures à parler de (... et surtout écouter) celui par qui la France a connu tous les podiums des compétitions internationales. Pemier francais champion du monde voltige. On lui doit, à titre de pilote, puis à titre d'entraineur national, toutes les médailles d'or, d'argent et de bronze en individuel et par équipe que compte ce pays depuis 15 ans. La relève sera difficile à assurer.... Même les américains (et les américaines....) ont essayé de le débaucher. Mais la route était déja tracée ici. Tant mieux pour nous.

Une ambiance d'enfer. On ne se lasse pas d'écouter Coco nous parler des compet qu'il a vécu, comme pilote, entraineur ou juge. On rigole à ses anectdotes innombrables. Dernier jeu à la mode, on parle anglais entre nous. Il y a des séances d'évaluation du niveau d'anglais pour le personnel du SEFA, et on se met à commenter tout, et le reste, dans la langue de Shakespeare. Exemple, lors de tours de piste pour s'entrainer aux atterrissages de piste avec Coco, mon binôme prend un oiseau dans l'hélice. Saucisson et sauce tomate garantis sur tout le pare-brise. Au départ du vol suivant, je dis à Coco : "Take your gun.... for the birds ! - Ah ! The gun, yes, of course !".

Mon binôme est pilote de Xingu et de Nord 262 dans l'Aéronavale. Basé à Hyeres, le veinard. Il a tâté du CAP232 chez Catherine Maunoury. En fait, sans le savoir, on a volé dans le même club (Var Voltige) au Castellet, et on a fait notre stage instructeur à Saint-Geoirs à la même époque. C'était en ..... enfin, il y a longtemps....

Alors, c'est parti pour une semaine. Sauf que le temps n'est pas favorable. Premier vol en CAP10, durée : 10 minutes. Plafond trop bas. Coco nous dit : "Si le vent dépasse 25 noeuds, on ne vole pas !" En fait, c'est parce qu'on n'arrive plus à contrôler l'avion au roulage au sol au delà ! Pour rattraper les deux jours de crasse, on fera des séances d'une heure matin et soir les derniers jours..... Et ca y va. Tout y passe. Le moindre détail est décortiqué. Des choses nouvelles arrivent : vrilles plates, moteurs calés, etc.

Les derniers jours, le temps se dégage bien. Vue grandiose sur toute la chaine des Pyrennées éclatante sous le soleil. Au nord du terrain, les collines sont encore sous la neige à 1200 mètres (on est fin janvier). Ca n'arrête pas de souffler : 20-25 noeuds en moyenne les premiers jours. Ca descendra à 12-18 a la fin de la semaine. Ouf ! On peut voler.

Visite de l'atelier de maintenance au SEFA de Castelnaudary. Tout moteur un tant soit peu usé en ressort plus neuf que neuf, ausculté jusqu'au dernier boulon. A voir absolument, la vitrine insolite : tout ce que les tortures peuvent infliger à la mécanique (pièces usées, cassées, cylindres perforés, inimaginable...)

Une semaine déjà et je suis cassé, moi aussi. J'ai mal partout : aux épaules et dans le haut du dos surtout, très sollicités dans les figures. Un début de tendinite au coude droit, à force de souquer en roulis, sans doute.... Il me faudra au moins une semaine pour récupérer.... Pourtant, j'étais en forme en arrivant. Pas un seul voile noir. Juste une fatigue chronique qui s'installe, pesante, qui n'arrête pas de s'imposer au fil des jours, et de m'imposer des heures de récupération de plus en plus fréquentes. J'en arrive à m'allonger une heure avant un vol. La toute dernière séance, vendredi à 11 heures du matin : "La plus mauvaise heure", m'a dit Coco. J'ai commis l'erreur de ne rien manger juste avant. Hypoglycémie rampante. J'accuse le coup en vol. Plus rien ne passe. Coup de pompe.
Ca sera mon plus mauvais souvenir....
Et pourtant, je n'arrête pas de demander à Coco quand est-ce que je peux revenir.....

Je viens de retrouver par hasard une cassette vidéo, sans étiquette, apparemment neuve, dans un placard.
Curieux de savoir si elle contient quelquechose, je la visionne.
Et je tombe avec surprise sur une émission de l'excellent et regretté magazine "Pégase" de FR3, que j'avais enregistrée en mai.... 1996, qui parle du centre SEFA de Carcassonne, avec moultes images de la vieille ville, de voltige et de nombreuses séquences ou Coco est interviewé. Vous savez, celle ou l'on voit Coco donner un coup de pied dans le pneu de sa 4L !
Des évolutions de CAP 10, CAP 231 et 232, superbes.
Et, cerise sur le gâteau, une séquence pour le 60e anniversaire du Spitfire.....
Le hasard fait bien les choses.
 
 
 
 
 

Toan
27 aout  2001